lundi 28 février 2011

Le microcrédit est-il le faux-nez du néolibéralisme ?

Les Cahiers d'Outre-Mer ont publié en 2007, un texte d'Élisabeth Hofmann et de Kamala Marius-Gnanou intitulé : "Le microcrédit est-il le faux-nez du néolibéralisme ?". Les auteurs y posent la question suivante : dans un contexte de mondialisation, le microcrédit pour des femmes a été largement investi par la plupart des grands organismes internationaux et de nombreuses ONG. Est-ce une panacée pour combattre la pauvreté dans le monde ou une manière d’introduire aussi les plus vulnérables dans l’économie néolibérale mondiale ?


Les femmes bénéficiaires de la microfinance (© picture-alliance/Godong)

Précisions sur les auteurs : Élisabeth Hofmann est coordinatrice du réseau Genre en Action ; Kamala Marius-Gnanou est maîtresse de Conférences en géographie et aménagement Université Bordeaux III, chercheuse associée à l’Institut Français de Pondichéry membre de la Chaire Unesco de l’Université Bordeaux 3 pour la formation des professionnels du développement durable.

Passons toute de suite à la conclusion de l'étude : pour les deux auteurs, dans la majorité des cas, la microfinance crée un filet de sécurité évitant ainsi des situations sociales explosives, sans pour autant représenter une échelle pour sortir durablement de la pauvreté.

Microfinance, économie marchande et désengagement de l'État

Si la microfinance a donc des avantages indéniables, cela n'empêche pas Élisabeth Hofmann et Kamala Marius-Gnanou de poser des questions très intéressantes sur les liens entre la microfinance, la globalisation de l'économie marchande et le désengagement porgressif de l'Etat en matière de services publics.

Sur la microfinance et la globalisation de l'économie marchande :
Et si derrière la lutte contre la pauvreté étaient cachés des intérêts peu avouables ? Il y a quinze ans déjà, Serge Latouche donnait une toute autre explication au fabuleux destin du microcrédit et notamment à l’implication grandissante des banques dans ce secteur : il s’agirait de tentatives de captation des ressources financières informelles qui circulent traditionnellement dans de nombreuses sociétés sous forme d’associations rotatives d’épargne et de crédit, AREC (appelées tontines, merry-go-rounds, Chit funds, etc.). La success story de la Grameen Bank a parfois fait oublier que dans la plupart des sociétés, même des personnes relativement démunies avaient déjà accès à diverses formes de crédits solidaires avant l’existence des microcrédits. Or, cette forme ancienne d’économie solidaire fait tâche dans un contexte de globalisation de l’économie marchande

Sur la microfinance et le désengagement progressif de l'État en matière de services publics :
On ne peut s’empêcher de poser la question : et si le financement de programmes de microcrédit au profit essentiellement de groupes pauvres et plus particulièrement de femmes était organisé dans le but de ne pas remettre en cause le désengagement de l’État en matière de services publics ? La microfinance en faisant croire que tout actif potentiel, notamment les femmes les plus pauvres et les plus vulnérables peuvent être entrepreneures ou créer leur emploi favorise le processus de mondialisation néo-libérale ; cela crée un filet de sécurité évitant ainsi des situations sociales explosives, sans pour autant représenter une échelle pour sortir durablement de la pauvreté. La microfinance participe ainsi au processus de mondialisation en devenant une forme de subsidiarité de l’action publique, mais une subsidiarité inefficace et insuffisante face aux besoins pratiques et stratégiques toujours grandissants comme corollaire de ce processus.

Lire l'étude complète :
Élisabeth Hofmann et Kamala Marius-Gnanou, « Le microcrédit est-il le faux-nez du néolibéralisme ? », Les Cahiers d’Outre-Mer n° 238, Avril-Juin 2007.

vendredi 25 février 2011

Fermeture d'une banque de microfinance au Cameroun

Information du Journal du Cameroun : la Compagnie financière de l’estuaire (Cofinest) a fermé ses portes le 21 février 2011, laissant ses clients dans le désarroi. En effet, dans le cadre juridique camerounais, rien ne garantit le remboursement des clients des banques de microfinance, contrairement aux autres banques. La Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) n'a en effet rien prévu en cas de faillite de banques de microfinance.

Les épargnants de la Conifest se tournent maintenant vers les pouvoirs publics pour trouver une solution. Ils ont d'ailleurs annoncé pour le 28 février une grève pacifique qu’ils pourraient faire devant la direction générale de la microfinance.

Le ministre des finances Essimi Menye a annoncé que l'État a pris le dossier en main et va chercher des solutions.

Lire également les articles de La Nouvelle Expression et de Cameroon Tribune.

De la crise des subprimes et de la microfinance

La récente crise de la microfinance a montré que ce secteur devait être bien règlementé pour ne pas tomber dans les excès et ne pas être considéré comme une opportunité de gagner de l'argent sur le dos des pauvres. En effet, pour répondre aux demandes toujours plus pressantes des investisseurs, certaines institutions de microfinance ont commencé à multiplier les techniques pour vendre leur microcrédit, quitte, pour cela, à autoriser des "prêts croisés" très risqués. S'en sont suivis des impossibilités de remboursement.

microfinance crise subprimes inde

Julie de Brosse, de l'Expansion, a établi un parallèle entre la crise des subprimes et celle de la microfinance. surtout en Inde. Jusqu'à quel point ce parallèle est-il pertinent ?

Points communs des deux crises

Dans les deux cas, des populations peu fortunées se sont retrouvées dans l'impossibilité de rembourser leurs crédits. Dans les deux cas, il s'agissait de crédits auxquels les emprunteurs ne pouvaient pas toujours prétendre. Dans les deux cas, cela a abouti à une multitude de mauvais crédits en circulation. Dans les deux cas, les organismes prêteurs ont multiplié les excès pour des questions de rentabilité.

Limites de la comparaison

Pour Julie de Brosse, "aujourd'hui, le risque systémique des IMF est loin d'être démontré. Ces dernières parviennent toujours à se financer auprès des banques commerciales. Elle cite William Parienté, professeur à l'École d'Économie de Paris, selon lequel "actuellement, le plus gros risque serait que les initiatives politiques qui ont eu lieu en Inde aboutissent à une crise de confiance des emprunteurs à l'égard des IMF, c'est-à-dire qu'ils cessent complètement de rembourser leurs prêts. Ceci pourrait mettre en péril le principe même du microcrédit en Inde".

Julie de Brosse poursuit : "contrairement aux subprimes justement, ce ne sont pas les crédits en eux-mêmes (émis à des taux fixes et non accolés au marché immobilier) qui sont néfastes, mais plutôt la multiplication de ces crédits auprès de populations difficiles à éduquer sur le sujet du surendettement, notamment. Baptiste Venet, professeur d'économie à Paris Dauphine, ajoute : "contrairement à ce qui a pu être dit, la crise indienne ne s'est pas accompagnée d'une hausse manifeste des taux d'intérêt. Au contraire, la concurrence a plutôt eu tendance à peser sur ces taux". En Inde, ces taux ne dépassent guère les 24 % par an, alors qu'ils atteignent allègrement les 60 % ou 80 % au Mexique.

lundi 21 février 2011

La journée nationale du crédit communautaire au Québec

Le 11 mars est une journée spéciale pour la microfinance au Québec. Depuis 2009, il s'agit en effet de la Journée nationale du crédit communautaire. Cette année-là, l'Assemblée nationale a adopté une motion "reconnaissant l’apport du microcrédit québécois original, comme une solution à la crise, comme un outil de développement des personnes et des communautés, un moyen d’investissement social responsable, comme un placement éthique et comme un outil de développement économique".

RQCC microcredit microfinance quebec

Le 11 mars est particulièrement célébré par le Réseau québécois du crédit communautaire (RQCC). En 2009, le RQCC avait placé la journée sous le thème "Le microcrédit québécois ORIGINAL : une solution à la crise" ; en 2010, sous le thème "Le microcrédit québécois ORIGINAL : c’est gagnant !". Le RQCC regroupe 22 membres présents dans douze régions administratives du Québec et a pour mission de développer et de promouvoir l'approche du crédit communautaire dans la perspective du mieux-être individuel et collectif.

On se souvient qu'en 1900, Alphonse Desjardins avait déjà mis en place la première « caisse populaire » qui généralisait l’épargne et un système de crédit accessible aux ouvriers comme aux agriculteurs. Il participe ensuite à la constitution de coopératives d’épargne et de crédit aux États-Unis d’Amérique. L'accès au crédit pour les plus démunis est donc une tradition au Québec !

Pourtant, le RQCC affirme qu'une barrière s'élève entre le microcrédit et le Québécois. Dans un entretien accordé à Courrier Laval en 2009, Abder Izirri, président du Réseau québécois du crédit communautaire, expliquait : "parce que la formule vient du Bangladesh, les gens croient qu’elle n’est bonne que pour les pays en voie de développement, dit-il. C’est faux! Il y a beaucoup de gens ici qui sont exclus du circuit bancaire. Et avec la crise économique qui s’accentue, ils seront de plus en plus nombreux".

vendredi 18 février 2011

Muhammad Yunus, le microcrédit et les mégaprofits

Le 14 janvier 2011, Muhammad Yunus, Président de la Graamen Bank et Prix Nobel de la Paix 2006, a publié dans le New York Times une tribune qui a fait beaucoup parler dans le landerneau de la microfinance. Intitulée "Sacrifier le microcrédit pour les mégaprofits" [Sacrificing microcredit for megaprofits], la tribune met en cause la "commercialisation" de la microfinance et les usuriers [shark loans] qui pratiquent des taux d'intérêt exorbitants. Pour lui, 2005 est l'année où tout a commencé à changer... et pas en bien.


Muhammad Yunus acclamé par les Bangladais.

Muhammad Yunus explique :

Les ennuis ont commencé autour de 2005 quand plusieurs prêteurs ont commencer à chercher des moyens de faire du profit sur les emprunts en passant d'un statut d'Organisation à but non lucratif à un statut d'entreprise commerciale. En 2007, Compartamos, un banque mexicaine, est devenue la première banque d'Amérique latine de microcrédit à s'introduire en bourse . En août dernier, SKS Microfinance, la plus grande banque de microfinance d'Inde, a récolté 358 millions de dollars lors d'un premier appel public à l'épargne (PAPE).

Pour s'assurer que leurs petits prêts soient profitables à leurs actionnaires, de telles banques ont eu besoin d'augmenter les taux d'intérêts et de s'engager dans une collecte des prêts agressive. L'empathie qui existait naguère envers les emprunteurs quand les prêteurs appartenaient des organisations à but non lucratif a disparu. Les personnes pour qui le microcrédit était censé être une aide en ont souffert. En Inde, les emprunteurs ont commencé à croire que les prêteurs tiraient profits d'eux ; ils ont commencé à arrêter de payer leurs remboursements.

La commercialisation a été un terrible tournant pour la microfinance et cela indique un inquiétant basculement dans les motivations initiales de ceux qui prêter de l'argent aux pauvres. La pauvreté doit être éradiquée ; elle ne doit pas être considérée comme une opportunité de gagner de l'argent.

Lire la tribune complète de Muhammad Yunus : "Sacrificing Microcredit for Megaprofits".

Essor de la microfinance à Madagascar

Information communiquée par L'Express de Madagascar via le Portail Microfinance : selon la coordination malgache de la microfinance, le taux d'accès de la population est passé de 10 %, fin 2009, à plus de 16 %, fin 2010. Avant la crise, le pays a mis 5 ans pour atteindre un tel chiffre. En 2004, le taux de pénétration était seulement de 5 % avant de passer à 7 % en 2007, et à 9 % en 2008. 21 sur les 22 régions du pays sont aujourd'hui couvertes par les institutions de microfinance. Il reste le Melaky, qui devra l'être prochainement.

D'après Blaise Rajoelina, coordonnateur national de la microfinance, "les Malgaches commencent à acquérir une leçon de crédit et prennent des initiatives pour faire des activités de survie face à la crise. La microfinance devient alors un véritable besoin".

Lire la suite de l'article.

mercredi 16 février 2011

Tokio Marine Middle East veut développer la microfinance en Egypte

Selon The Daily Star, suite à la "révolution" égyptienne, l'assureur Tokio Marine Middle East, une filiale du japonais Tokio Marine Holdings, réfléchit à développer une offre de micro-assurance du type "takaful" au pays des Pharaons.

Le Takaful (du verbe arabe kafalah, "se garantir") est un concept d’assurance basé sur la coopération et la protection et sur l’aide réciproque entre les participants. Il est basé sur la mutualisation des risques, l’absence d’intérêt, le partage des profits et des pertes, la délégation de gestion par contrat d’agence et l’interdiction des investissements illicites.


Ajmal Bhatty, PDG de Tokio Marine Middle East.

Ajmal Bhatty, PDG de Tokio Marine Middle East, argue que la compagnie a déjà fait ses preuves en micro-assurance en Inde, grâce à un partenariat avec une société nippone de fertilisant : "nous aimerons explorer les possibilités du microtakaful en Égypte car une bonne partie de la population en bénéficierait".

Muhammad Yunus et la crise de la microfinance

Le 7 décembre 2010, La Croix a publié un entretien avec Muhammad Yunus, fondateur de la Grameen Bank et prix de Nobel de la paix 2006, et Maria Nowak, présidente de l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE).

Cet entretien intervenait au moment la microfinance commençait à être critiquée et considérée comme un échec, surtout depuis sa financiarisation dans les années 2000. Directement touchés par la crise économique mondiale, des micro-entrepreneurs se sont suicidé, notamment en Inde. Des événements tragiques largement médiatisés. Muhammad Yunus met en cause une "dérive" du microcrédit : "le microcrédit ne doit pas être présenté comme une opportunité pour gagner de l’argent". Il ne remet pourtant pas en cause le système lui-même. Maria Nowak affirme d'ailleurs qu'"en Europe, l’intérêt va croissant pour le microcrédit".


Muhammad Yunus et Maria Nowak en 2007

De récents scandales ont terni l’image du microcrédit en Inde. Êtes-vous inquiet ?

Muhammad Yunus : Oui, je suis inquiet. Certaines personnes ont pris une mauvaise direction et ont franchi la ligne jaune, en prêtant n’importe comment, avec souvent des objectifs assez éloignés de leur mission. Dans certains cas, le microcrédit est devenu une sorte de crédit à la consommation servant à financer les achats courants des ménages.

Quelles sont les mesures à prendre ?

Muhammad Yunus
: Il faut condamner ces errements et mettre rapidement de l’ordre. Si l’on ne fait rien tout de suite, d’autres acteurs se lanceront sur ce secteur en faisant la même chose, car l’Inde est un pays où les besoins sont immenses. Je plaide, par exemple, pour imposer un code de bonne conduite aux institutions de microfinance. Ce serait une manière de séparer ceux qui font du microcrédit de ceux qui n’en font pas. Il faut aussi mettre en place une limite sur les taux d’intérêt pratiqués. Le bon niveau serait d’ajouter 10 % au coût de la ressource, afin de couvrir les frais de fonctionnement. Ce qui représente des taux autour de 20 %. À ce niveau, tout le monde est gagnant.

Maria Nowak : En France, la préoccupation principale n’est pas celle des taux d’intérêt, mais de l’accompagnement des créateurs d’entreprise, notamment pour les plus précaires. C’est la raison pour laquelle nous avons créé le fonds ADIE. Associé au statut de l’auto- entrepreneur, le microcrédit permet aux gens d’être plus autonomes, plus créatifs. C’est également un moyen de sortir du travail informel et d’avoir une couverture sociale. Il s’agit d’un progrès énorme.

La mission des institutions de microfinance est-elle de faire des profits, comme lors de l’introduction en Bourse de SKS, en Inde ?

Muhammad Yunus
: Cela a été une erreur fondamentale et un mauvais signal. Le microcrédit ne doit pas être présenté comme une opportunité pour gagner de l’argent. Il doit d’abord servir à créer de l’activité, à permettre aux plus démunis d’avoir un métier. Les institutions de microfinance ont besoin d’argent, mais l’important est la manière dont les profits sont redistribués. La Grameen Bank, que j’ai fondée, appartient, par exemple, aux emprunteurs. Ce sont eux qui perçoivent les bénéfices réalisés, avec un taux de dividende de l’ordre de 20 %.

Ces dérives en Inde peuvent-elles freiner le développement du microcrédit dans le monde ?

Muhammad Yunus
: Non, car il s’agit d’un problème purement local.

Maria Nowa
k : En Europe, l’intérêt va croissant pour le microcrédit. C’est une tendance lourde. La Commission européenne vient ainsi d’intégrer la microfinance dans sa stratégie de croissance.

mardi 15 février 2011

Dates clefs de la microfinance selon l'AFD

En 2005, l'Agence Française de Développement (AFD) a publié les dates clefs de la microfinance à travers les âges et les continents. De 19653 à 2005, de la France au Bangladesh, en passant par le Kenya, l'Irlande et le Canada, on assiste à l'essor d'un outil financier aujourd'hui bien établi. On notera que la microfinance s'est surtout développée à partir des années 1970, où des expériences pionnières ont progressivement intégré le secteur financier.

1653 : un financier italien, Lorenzo Tonti, appelé en France auprès de Mazarin, crée une nouvelle formule d’épargne sous forme d’association d’épargnants. Il donnera son nom à la tontine.

1720 : à Dublin, Dean Jonathan Swift est le premier à prêter de petits montants à des artisans pauvres de la ville. Son initiative est imitée au cours des décennies suivantes par plusieurs organismes irlandais comme la Dublin Musical Society.
Pierre-Joseph Proudhon, fondateur de la Banque du Peuple en 1849.
1849 : Pierre-Joseph Proudhon fonde en France la « Banque du Peuple » qui distribue des crédits gratuits. Si cet établissement ne vit que quelques semaines, d’autres banques se créeront en suivant son exemple au cours des années suivantes.

1864 : l’Allemand Friedrich-Wilhelm Raiffeisen fonde en Rhénanie la première société coopérative de crédit mutuel. Son objectif : offrir aux banques des cautions mutuelles afin que les paysans démunis accèdent au crédit.

1893 : en France, c’est Louis Durand qui crée la première Caisse rurale et ouvrière sur le modèle Raiffeisen. Dans les années qui suivent, l’Etat français lance, sur le même mode, le Crédit agricole pour tenter de réorganiser et soutenir l’agriculture.

1900 : au Canada, Alphonse Desjardins met en place la première « caisse populaire » qui généralise l’épargne et un système de crédit accessible aux ouvriers comme aux agriculteurs. Il participe ensuite à la constitution de coopératives d’épargne et de crédit aux Etats-Unis d’Amérique.
Alphonse Desjardins, fondateur des Caisses Populaires Desjardins au Canada.

1963 : fondation de l’Institut coopératif Desjardins, centre de formation du Mouvement Desjardins qui cherche à essaimer ses principes hors du Canada. Dans la foulée, il accueille ses premiers stagiaires étrangers venus notamment d’Afrique.

1963 : au Cameroun est montée la Cameroon Cooperative Credit Union League, l’un des tout premiers réseaux institutionnels de microfinance du continent africain. Des expériences de « Credit Unions » ou de Coopératives d’épargne et de crédit (Coopec) existent au Ghana, au Nigeria, au Kenya ou en Ouganda dès 1956. D’autres sont lancées en 1969 au Togo ou en 1972 au Burkina Faso.

1973 : à Recife, au Brésil, le personnel de l’ONG Accion, fondée en 1961 à Caracas, se lance dans l’appui à la création de systèmes de microfinancement à destination de microentreprises
et des populations pauvres.
Muhammad Yunus, fondateur de la Grameen Bank au Bangladesh et Prix Nobel de la Paix en 2006.

1983 : après quelques années d’expérimentation, la Grameen Bank, fondée au Bangladesh par Muhammad Yunus, devient une banque indépendante. La même année naît en République dominicaine l’ONG Ademi qui fournit des produits et services de micro-financement à une clientèle à faibles revenus. En 1997, elle reçoit un agrément bancaire pour créer une banque commerciale, la Banco Ademi, spécialisée dans les prêts aux microentreprises.

1984 : en Indonésie, la Bank Rakyat Indonesia, créée en 1950, est la première banque commerciale publique à développer un département microcrédit. Elle devient au fil des ans la banque la plus importante du secteur indonésien de la microfinance et la plus grande institution de microfinance rentable des pays du Sud. En 2001, elle compte plus de 2,7 millions de clients de micro-crédits, dont environ 25 % sont des femmes.

1995 : la Banque mondiale institue le Groupe consultatif d’assistance aux pauvres (CGAP), qui réunit 29 bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux en vue de soutenir le secteur de la microfinance.

1995-1996 : le programme « Sustainable Banking with the poor » de la Banque mondiale répertorie les institutions de microfinance dans le monde : il dénombre alors 1.000 institutions ayant au moins 100 clients et opérant depuis au moins trois ans. Une enquête menée en 1995 montre, elle, que l’encours total de crédits issus de la microfinance s’élève à 7 milliards de dollars et que plus de 13 millions de personnes en bénéficient.

1997 : un premier Sommet du Microcrédit a lieu à Washington, organisé par une ONG américaine. Objectif : lancer une campagne globale pour que, d’ici à 2005, cent millions des familles les plus pauvres du monde reçoivent un crédit qui les aide à créer leur emploi.

1997 : création du Centre pour la microfinance (MFC), devenu le plus important centre de formation et de services dans le secteur de la microfinance pour les pays de l’Est et de l’Europe centrale. Il relie un réseau de 86 institutions de microfinance.
2005 : année internationale du microcrédit.

2005 : année internationale du microcrédit.

Avril 2005 : pour la première fois en Afrique, une institution de microfinance lève des fonds en bourse : Faulu, une des plus importantes institutions de microfinance du Kenya, met sur le marché 5 millions d’euros d’obligations qui bénéficient d’une garantie à 75 % de l’Agence française de développement.

vendredi 11 février 2011

Pourquoi ce blog sur la microfinance

Pourquoi un blog sur la microfinance aujourd’hui ?

Comme on peut le lire depuis plusieurs mois, après des louanges quasi-unanimes pendant plus de 30 ans, la microfinance est aujourd’hui critiquée et remise en question par des personnalités politiques de pays comme le Bangladesh, l’Inde et le Nicaragua.

Comment en est-on arrivé là ?

Comment un mécanisme financier considéré il y a encore un an comme une solution miracle à la pauvreté est aujourd’hui discrédité par une partie de ses anciens partisans ?

On peut lire ça et là des déclarations reprochant à la microfinance d’endetter les pauvres et d’enrichir, une fois de plus, les banques avides d’argent. Plusieurs cas de suicides de fermiers indiens vivant du microcrédit ont particulièrement alimenté cette polémique

S’agit-il d’une crise passagère due à une poignée de banques malhonnêtes ou dépassées par le développement ? Ou s’agit-il du dysfonctionnement systémique d’un secteur arrivé à bout de souffle ?

On peut difficilement écarter d’un revers de la main les quelque 154 millions de personnes qui bénéficient ou ont bénéficié de la microfinance pour les aider à fonder et développer une entreprise.

S’il est naïf de penser que la microfinance peut régler toute la pauvreté dans le monde, il est tout aussi réducteur, après quelques échecs, certes dramatiques, de rejeter la microfinance et de la faire passer pour le contraire de ce qu’elle est.

Ce blog a donc pour objectif de jeter un regard lucide et de distiller un peu plus de complexité qu’à l’usage, les enjeux de la microfinance, évoquer son évolution depuis ses origines et, pourquoi pas, imaginer son avenir et ses possibles mutations. Le blog publiera également des billets sur les initiatives quotidiennes de microcrédits et le développement des pays émergents. Enfin, il relayera tous les avis (louanges et critiques) de personnalités diverses (politiques, financières, intellectuelles, humanitaires et civiles) sur la microfinance.